Une information instantanée et en continu à l’origine de dérives de plus en plus fréquentes
Les nouvelles pratiques du journalisme et du journalisme de santé en particulier ont terriblement évolué. Autrefois, les médias faisaient la course au scoop, ils avaient ainsi un ou deux jours d’avance sur leurs concurrents ; aujourd’hui le scoop ne dure que quelques secondes. Les journalistes doivent livrer une information instantanée ; dès qu’une information paraît, elle doit être reprise le plus vite possible. D’où l’importance des dépêches des agences de presse qui sont reprises à l’identique, à l’infini, tout au long de la journée ; certains médias modifient uniquement leur titre les rendant plus sensationnels et accrocheurs, de façon à attirer une audience toujours plus large pour occuper le plus rapidement possible la une de Google.
Cette information instantanée est aussi une information en continu. Le résultat est que l’on voit maintenant régulièrement des informations publiées très rapidement, sans avoir été analysées et vérifiées, sans avoir pris le temps d’interroger des experts pour obtenir un éclairage ; on sait que l’on pourra modifier ces informations rapidement si elles s’avèrent incomplètes ou erronées. C’est ce qui explique que nous voyons apparaitre de plus en plus de dérives qui brouillent considérablement les messages délivrés auprès du public qui a du mal à se faire une opinion notamment lorsqu’il s’agit de messages de santé publique. Ces informations souvent contradictoires, rarement expliquées et pondérées, ne sont pas sans conséquences sur les comportements des citoyens, comme celles qui concernent les messages de dépistage et de prévention. En cancérologie, les informations se succèdent qui disent tout et leur contraire, et c’est toujours la première annonce qui sera la plus forte et qui restera dans les esprits quelque soient les réactions ultérieures. Trouver la bonne information devient de plus en plus difficile. Les médias, les journalistes, les émetteurs d’information et les communicants devraient s’interroger davantage pour continuer à garantir la qualité de l’information santé.
Une surabondance de données et une information toujours plus uniforme
Par ailleurs, nous n'avons jamais eu accès à autant de sources d’information et de données et paradoxalement, l'information n'a jamais été aussi uniforme. Il y a là une extraordinaire opportunité pour les journalistes d’aller dépister une information inédite. Ces journalistes sont les journalistes de demain.
Les agences de presse ne sont plus l’unique source pour les rédactions
Jusqu’il y a peu, les agences de presse était les principaux émetteurs d’informations auprès des rédactions. Certains journalistes ne regardent plus aujourd'hui ces dépêches mais suivent dans leur Newsroom, l'actualité sur Twitter. En effet, une information diffusée par les agences se retrouve dans l'instant sur tous les sites médias et est immédiatement reprise sur les réseaux sociaux. Certains suivent également l'actualité sur BFM TV. Des agences comme l'Agence de Presse Médicale (APM) ont bien sorti leur épingle du jeu. Les journalistes, à l'affut du papier inédit et de l’étude dont on n’a pas encore parlé, vont aller chercher l’information auprès de ce type d'agence ou directement sur les blogs de certains chercheurs ou médecins. Ils vont ensuite traiter l'information sous différents formats : papier, vidéo, infographie... Le numérique est en ce sens une opportunité fantastique.
Interview réalisée dans le cadre de l'enquête sur « Les nouvelles pratiques du journalisme de santé » menée par l’Argus de la presse et Capital Image, 2015.
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